Mais qui donc est Ferdinand Denis ?


– Un personnage multiple. Célèbre et toujours célébré au Brésil, quasiment inconnu en France. Un jeune aventurier parti faire fortune aux Amériques : il y resta trois ans, y jeta sa gourme, observa, écouta, apprit, lut tout ce que la bibliothèque de Bahia possédait d’ouvrages savants, d’œuvres modernes et d’archives. Lui aussi remonta son fleuve, le Jequitinhonha, et s’émerveilla de la forêt luxuriante et ordonnée. Le moustique eut raison du chercheur de coton. Ferdinand Denis revint en France, pauvre d’or, riche d’images, d’observations, d’inspirations.

Il en tira profit. Ses premiers écrits parurent dans des revues de géographie ; il se fit un nom en devenant le spécialiste de ces pays du sud et, tout particulièrement, du Brésil, auquel il consacra nombre d’ouvrages, sérieux, nuancés et bienveillants comme ses Scènes de la nature sous les Tropiques, adroit mélange de descriptions, de récits dans le goût, un rien larmoyant, de Bernardin ou de Chateaubriand mais aussi d’intuitions sur ce que deviendra, en effet, la littérature latino-américaine.

Mais pour important que fût son brésilianisme, Denis ne peut être réduit à ce rôle de “passeur culturel”, accueillant tous les Brésiliens de passage et leur prodiguant son appui.

Il fut membre du Cénacle dont le guide était Victor Hugo (et Devéria, l’ordonnateur des plaisirs) ; il fut de tous les salons, aimant la littérature, la peinture autant que la musique – Liszt fut l’un de ses amis intimes – et la conversaation ches Mme d’Agoult où George Sand lui contait ses souvenirs de jeunesse. Mais il était aussi un des rares fidèles de Senancour, un ami de Ballanche avec qui il conversait au coin des rues. Et Michelet le raccompagnait dans son cabriolet.

Collectionneur de proverbes et de Noëls, érudit en toutes sortes de matières, collaborateur prolixe de deux grandes entreprises éditoriales – la Nouvelle bibliographie générale de Didot et le Magasin Pittoresque – il fut le bibliothécaire du ministère de l’Instruction publique avant que d’obtenir un emploi de conservateur à la Bibliothèque Sainte-Geneviève, son domaine quarante-quatre ans durant…

Ajoutons que Denis fut aussi un spécialiste des sciences occultes et, pour Jean-Pierre Laurant, le personnage clef de l’ésotérisme chrétien.

Un homme à facettes, si “divers et ondoyant” que la question reste posée : Qui donc est Ferdinand Denis ?


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